Bâtiments tertiaires : sécuriser les coûts dès la phase esquisse (ratios €/m², aléas)

Cabinet Bagot _ Bâtiments tertiaires : sécuriser les coûts dès la phase esquisse (ratios €/m², aléas) _ Economistes de la construction

Pourquoi verrouiller le budget dès l’esquisse

Plus le chiffrage intervient tôt, plus les décisions sont réversibles et économiques. En phase esquisse, l’objectif n’est pas la précision au centime, mais un coût crédible, comparable d’un scénario à l’autre, et capable d’absorber les imprévus. La méthode ci-dessous combine ratios €/m², variantes structurées et provisions d’aléas pilotées.

1) Cadrer le périmètre avant de chiffrer

Hypothèses à figer

  • Programme fonctionnel par zones : plateaux de bureaux, espaces communs, RDC actif, parkings, locaux techniques.
  • Niveau d’aménagement visé : core and shell, prêt à cloisonner, open space équipé, fit-out complet.
  • Performances : objectif énergétique, confort d’été, acoustique, certifications éventuelles.
  • Contexte site : gabarit urbain, contraintes fondations, raccordements, acoustique extérieure.
  • Planning : jalons études, consultation, approvisionnements critiques.

Livrables attendus

  • Programme quantifié et plan de surfaces.
  • Assiette de chiffrage claire par niveaux et par lots.
  • Hypothèses techniques traçables pour chaque ratio.

2) Ratios indicatifs €/m² pour l’esquisse

Ordres de grandeur 2025 à adapter au marché local, aux hauteurs, au niveau d’équipement et aux ambitions environnementales. Ils servent de base pour comparer des variantes, pas de devis contractualisé.

Coûts travaux hors honoraires

  • Bureaux neufs core and shell : 1 250 à 1 650 €/m² SDP.
  • Bureaux neufs prêt à cloisonner (plateaux équipés CVC/élec, faux planchers, plafonds) : 1 650 à 2 100 €/m².
  • Fit-out locataire standard open space et salles de réunion : 350 à 800 €/m² SUBL selon niveau de finition.
  • Réhabilitation lourde tertiaire : 1 400 à 2 300 €/m² selon structure et remises aux normes.
  • Parkings : silo béton 9 000 à 12 500 €/place, sous-sol 16 000 à 28 000 €/place selon profondeur et pompage.

Répartition moyenne par familles

  • Gros œuvre, structure, façades : 40 à 55 %
  • CVC, électricité, SSI, plomberie : 25 à 35 %
  • Second œuvre intérieur et finitions : 10 à 20 %
  • VRD et aménagements extérieurs : 3 à 8 %

3) Variantes à comparer systématiquement

Enveloppe et structure

  • Façade mur rideau versus façade à trame avec allèges : delta 5 à 12 % selon performances et trames.
  • Menuiseries ouvrantes versus double peau ventilée : surcoût investissement mais gains confort/énergie possibles.
  • Dalle béton pleine versus prédalle/poutrelles : impact sur portées, réservations, acoustique.

Confort et performances

  • Production CVC tout air versus détente indirecte avec rafraîchissement adiabatique selon climats et charges internes.
  • Niveau d’instrumentation GTB et pilotage éclairage DALI avec détection présence/lumière du jour.
  • Stratégie d’ombrement extérieur, facteur solaire des vitrages et protections fixes/mobiles.

Règle de décision

Comparer chaque variante en coût global sur 10 à 20 ans : CAPEX, OPEX, maintenance, confort utilisateurs, valeur locative.

4) Méthode de chiffrage pas à pas

Étape A : Estimatif par zones

  • Appliquer un ratio de base aux surfaces par niveau et par usage.
  • Isoler les postes singuliers au forfait : escaliers architecturaux, patio, double hauteur, rooftop technique, bornes IRVE.

Étape B : Ajustements techniques

  • Hauteur libre accrue, densités d’occupation, charges plancher, acoustique renforcée.
  • Exigences incendie et compartimentage impactant façades et réseaux.
  • Contraintes structurelles en réhab : reprises en sous-œuvre, désamiantage, renforts.

Étape C : Coûts hors bâtiment

  • VRD, gestion des eaux pluviales, paysagement et mobiliers extérieurs.
  • Taxes et études réglementaires le cas échéant.

Bonnes pratiques

  • Documenter toute correction de ratio dans une ligne dédiée avec justification.
  • Conserver une version de base et un scénario optimisé pour garder la lisibilité des écarts.

5) Aléas et risques : comment provisionner

L’aléa n’est pas un « sac à dos » unique. Il se répartit par familles à risque et se pilote tout au long du projet.

Niveaux de provisions usuelles

  • Esquisse : 10 à 15 % sur le total travaux selon maturité du programme.
  • APS : 7 à 10 % avec variantes cadrées et hypothèses techniques stabilisées.
  • APD : 5 à 8 % lorsque les quantités principales sont fiabilisées.

Registre de risques type

  • Marché et approvisionnements : délais CVC, TGBT, menuiseries techniques.
  • Technique : acoustique de façade, confort d’été, étanchéité à l’air.
  • Site : portance des sols, nappe, nuisances de chantier, accès urbains.
  • Programme : densité d’occupation, évolutivité, niveau d’équipement IT.

Gouvernance

Associer chaque risque à un responsable, une action de réduction et une provision chiffrée. Suivre mensuellement le taux de consommation d’aléas.

6) Exemple éclair de lecture budgétaire

Hypothèses : immeuble neuf R+6, 9 000 m² SDP, core and shell 1 500 €/m², prêt à cloisonner +350 €/m² sur 70 % des surfaces, VRD 5 %, honoraires 10 %, aléas 10 %.

  • Core and shell : 9 000 × 1 500 = 13 500 000 €
  • Prêt à cloisonner : 6 300 × 350 = 2 205 000 €
  • VRD 5 % : 785 250 €
  • Total travaux HT : 16 490 250 €
  • Honoraires 10 % : 1 649 025 €
  • Aléas 10 % : 1 649 025 €

Enveloppe cible : 19 788 300 € HT à affiner selon façades, CVC et site.

7) Feuille de route pour sécuriser le coût

Quatre jalons clés

  • Esquisse : ratios par zone, deux variantes d’enveloppe, première provision d’aléas.
  • APS : métrés sommaires, choix structurel, options CVC comparées, plan d’achats critiques.
  • APD : quantités affinées, DPGF pré-consultation, calage des performances.
  • Consultation : confrontation au marché, négos, ajustement final des provisions.

Indicateurs à suivre

  • Coût €/m² par zone et par lot.
  • Écart entre scénario de base et variantes retenues.
  • Taux de consommation des aléas et risques ouverts.

Conclusion

Sécuriser les coûts d’un bâtiment tertiaire dès l’esquisse, c’est combiner des ratios €/m² fiables, des variantes chiffrées en coût global et une provision d’aléas pilotée. Cette discipline permet de décider vite, de dialoguer sereinement avec les parties prenantes et d’arriver en consultation avec une enveloppe crédible grâce à un spécialiste en économie de la construction à Rennes.

Rennes : checklists & méthodes pour des coûts maîtrisés et des DCE propres